JE VIS JE MEURS...
Je vis je meurs; je me brûle et me noie.
J'ai chaud extrême en endurant froidure;
La vie m'est trop molle et trop dure,
J'ai grands ennuis entremêlés de joie;
Tout à coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.
Ainsi Amour incostamment me mène;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.
Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être en haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.
Louise Labé
in Pierre Ripert,
Dictionnaire Anthologique de la Poésie Française